PARIS - Les autorités françaises ont délivré un mandat d'arrêt à l'encontre du vice-président de la Guinée-Équatoriale, Teodoro Nguema Obiang Mangué, dans le cadre du dossier des «biens mal acquis», ont révélé des sources judiciaires vendredi.

Teodoro Nguema Obiang Mangué, dit «Teodorin», est le fils de Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, président de la Guinée-Équatoriale, un pays d'Afrique centrale riche en pétrole, en gaz et en bois.

Teodorin Nguema Obiang Mangué ne s'est pas rendu à la convocation des juges mercredi, son avocat estimant «qu'il ne peut être entendu sans l'accord de la Guinée-Équatoriale». Me Emmanuel Marsigny considère que par ses fonctions de deuxième vice-président en charge de la Défense, son client a une «immunité de juridiction» et que le mandat d'arrêt «est mort-né».

«On peut penser ce qu'on veut de la famille Obiang, mais la Guinée-Équatoriale est un État souverain et (Teodorin Nguema Obiang Mangué) en est le vice-président et il est reconnu comme tel», a-t-il déclaré à l'Associated Press.

La justice française enquête depuis décembre 2010 sur les conditions d'acquisition en France de biens figurant au patrimoine de trois chefs d'État africains, feu Omar Bongo (Gabon), Denis Sassou Nguesso (Congo-Brazzaville) et Teodoro Obiang Nguema Mbasogo (Guinée-Équatoriale).

«Les juges voulaient le mettre en examen pour blanchiment mais, pour cela, il faut qu'il y ait une infraction d'origine. L'abus de biens sociaux n'existe pas en Guinée-Équatoriale», a rappelé Me Marsigny, qui juge la situation «totalement invraisemblable».

Teodorin Nguema Obiang, qui avait déjà refusé de se rendre à une convocation des juges français en mars, est devenu deuxième vice-président de Guinée-Équatoriale en charge de la Défense en mai dernier.

«Après une première tentative diplomatique refusée comme représentant de la Guinée-Équatoriale à l'UNESCO, M. Obiang n'a pas hésité à se faire nommer vice-président», a dénoncé Me Joseph Breham, avocat et administrateur de Sherpa, une association anticorruption à l'origine de la plainte.

Ce mandat d'arrêt est «une excellente nouvelle qui sanctionne la mauvaise foi flagrante de M. Obiang», a ajouté Me Breham.

En septembre 2011, la police française a saisi seize véhicules de luxe, dont une Bugatti estimée à plus d'un million d'euros, appartenant à Teodorin Nguema Obiang.

Selon «Le Monde», ces voitures ont été payées «par la société Somagui Forestal (...), société de droit privé qui a pour unique dirigeant et actionnaire Teodorin Obiang et pour objet l'exploitation du bois».

À la mi-mai, une perquisition a été menée pendant plusieurs jours dans un immeuble de Paris appartenant au fils du président équato-guinéen. La perquisition avait été jugée «illégale» par les autorités de Guinée-Équatoriale.

La Guinée-Équatoriale a fait valoir que cet immeuble, situé dans le XVIe arrondissement, était affecté à sa mission diplomatique, et donc protégé. Cette affectation a été déclarée en octobre dans une note envoyée au ministère français des Affaires étrangères.

Les États-Unis s'intéressent également à M. Obiang. En octobre 2011, le gouvernement américain a annoncé son intention de récupérer une somme de 70 millions de dollars de «biens mal acquis» aux États-Unis par le fils du président équato-guinéen, dont un manoir à Malibu, un avion Gulfstream et des souvenirs de Michael Jackson.

Deux plaintes pour la confiscation de ces biens ont été déposés devant des tribunaux de Los Angeles et de Washington en juin 2011.

Selon un rapport du ministère français de la Justice datant de juin 2012, Teodorin Nguema Obiang Mangue aurait dépensé plus de 300 millions $ US de 2000 à 2011 pour acquérir des avoirs sur quatre continents, pour un montant supérieur aux bénéfices que sont censées dégager les deux entreprises forestières qu'il dit posséder. La plainte fournit en outre des éléments tendant à démontrer que ces deux sociétés n'existent que sur le papier et agissent uniquement comme vecteurs de revenus pour le fils du président équato-guinéen.