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quotidiennement faire des emplettes, du moins
ceux qui habitent les provinces
du Weule Ntem, pour le Gabon, et d'Ebebiyin
pour la Guinée Equatoriale.
Insuffisances
d'infrastructures. A l'instar de
la majorité des localités camerounaises de cet
acabit, Kyé-Ossi souffre d'un manque criard
d'infrastructures de base devant améliorer les conditions de vie des
populations.
La situation
semble plus préoccupante et mérite un peu plus
d'attention du moment où cette localité se retrouve
dans la zone frontalière, donc, reflète d'une
manière ou d'une autre l'image du Cameroun. Tenez
par exemple: la localité manque d'électricité. Il y
a 3 ans, l'axe central occupé par les boutiques,
était éclairé par des lampes tempêtes qui étaient
accrochées le long des devantures des boutiques.
Autour de 20h, la vie s'arrêtait presque ici, et
même les plus téméraires, les noctambules aguerris,
se retrouvaient dans l'obligation de calmer leurs
ardeurs, puisque l'obscurité de la nuit dictait sa
loi. Aujourd'hui, la situation s'est quelque peu
améliorée avec l'arrivée et l'installation dans la
localité des opérateurs économiques, qui se sont
procurés des groupes électrogènes, alors qu'à
quelques mètres de l'autre côté en Guinée
Equatoriale, les maisons et la route sont éclairées.
La localité s'est néanmoins vue ouvrir des espaces
de loisirs et la vie reste désormais mouvementée,
même à des heures tardives.
Dans le
secteur des télécommunications, pas de réseaux
téléphoniques camerounais. Kyé-Ossi est pourvu en
téléphone depuis quelque temps seulement, grâce aux
réseaux téléphoniques du Gabon et de la Guinée
Equatoriale. "Pour appeler ma hiérarchie à Ebolowa
ou à Yaoundé, je passe par le réseau Celtel de la
Guinée Equatoriale et je paie 600 Fcfa la minute.
C'est cher, mais, nous n'avons pas le choix.
D'ailleurs, nous sommes contents d'être quand même
joignables et de pouvoir appeler à tout moment",
confie un sous-officier de la gendarmerie. Il en est
de même pour l'audiovisuel. "Africa n°1", la "radio
africaine" émettant depuis le Gabon, est la radio
écoutée et captée presque partout ici, de même que
la radio nationale de la Guinée Equatoriale. Pas de
signal de la Crtv.
"Nous sommes coupés
de notre pays. Vous vous rendez compte,nous
ne sommes même pas au courant de ce
qui se passe à Ebolowa, à une centaine
de km d'ici, encore moins de ce qui se passe au
Cameroun. Nous sommes sous informés de ce qui se
passe dans notre pays. Imaginez une situation de
tension qui se déclencherait ici, les Camerounais
l'apprendraient d'abord à travers les médias
internationaux, puisque plus présents et plus
accessibles à nous", confie toujours le
sous-officier qui a requis l'anonymat.
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Assimilation
Les journaux,
c'est la perle rare. Lorsqu'ils réussissent à
arriver à Kyé-Ossi, c'est avec plusieurs jours de
retard, parfois plus d'une semaine. Dans ce cas, le
journal qui est vendu en temps normal à 300 francs
Cfa, coûte 600 francs. "Le gars qui nous apporte les
journaux d'Ebolowa le fait quand il a programmé un
voyage. Généralement, c'est 2 à 3 journaux qu'il
apporte et qui seront lus par tous ceux qui
travaillent dans la zone", dira Norbert Tanko,
gestionnaire d'une boutique au marché de Kyé-Ossi.
Quelques
instants passés à Kyé-Ossi font découvrir que les
Camerounais qui s'y trouvent, vivent dans une sorte
de cercle vicieux où ils doivent subir ce que leur
impose l'environnement. Un tour dans certains
services présents ici fait découvrir l'image des
personnes aux marques étrangères. A la brigade de
gendarmerie de Kyé-Ossi, les calendriers accrochés
sur les murs sont ceux des structures gabonaises et
équato-guinéennes. Même chose pour la boisson
consommée ici. Malgré les efforts que les sociétés
brassicoles camerounaises font pour être plus
présentes dans la localité, leurs boissons
apparaissent ici comme des boissons importées,
surtout en ce qui est de la bière. Le plus souvent,
le prix d'une bouteille de bière est l'équivalent du
prix de 2 litres de vin rouge en provenance de la
Guinée Equatoriale. Les liqueurs de même provenance
se vendent dans des échoppes le long des pistes, et
même les plus pauvres peuvent s'en procurer à des
modiques prix de 50 et 100 francs Cfa la
consommation.
Kyé-Ossi, ce n'est pas seulement ce tableau sombre.
C'est aussi une zone de fortes transactions
commerciales. Grâce à son marché qui vient d'être
aménagé, la localité est devenue un centre important
où les commerçants surtout camerounais, trouvent
leur compte. "Il y a des moments où ça tourne
vraiment mille à l'heure. Nous trouvons actuellement
notre compte avec surtout les Equato-guinéens. Ils
ont beaucoup d'argent et ils achètent sans trop
discuter", confie Robert Tangou, un commerçant de la
localité. Ainsi, dans ce marché, on retrouve des
produits de toutes sortes. Mais les plus en vue sont
les produits vivriers, qui proviennent pour
l'essentiel des provinces du Nord et de l'Ouest, des
villes de Yaoundé et de Douala. On y retrouve donc
du plantain et du manioc, denrées très prisées, des
pommes de terre, des oignons, l'ail, les arachides,
la tomate et le piment, denrées de luxe parfois,
atteignent des prix
inimaginables en contre saison, entre les mois de
décembre et mai. Le seau de 5 litres de piment coûte
parfois 25.000 francs, voire plus.
A côté de ces
produits alimentaires, on trouve les produits de
menuiserie, les chaussures et autres effets
vestimentaires. De toute évidence, c'est le plus grand
marché de cette zone frontalière, celui d'Abang-Minko'o
à la frontière avec le Gabon, aménagé sur financements
de la Banque Mondiale, n'étant opérationnel qu'une fois
par semaine, les samedis. C'est donc tout à fait normal
que ce dernier ne discute pas la vedette au marché de
Kyé-Ossi qui, au fil des jours, fait l'objet des études
de certains organismes internationaux tels la Snv, la
coopération néerlandaise, qui oeuvre pour
l'harmonisation et la facilitation des échanges dans les
zones transfrontalières, dans le but d'améliorer les
conditions de vie des populations riveraines, si l'on
s'en tient à son programme. Mais à côté de ces produits
"made in Cameroon", l'on retrouve, et ceci en forte
proportion, les produits venus de la Guinée Equatoriale
essentiellement, et composés des vins de table, des
liqueurs, des huiles de toilette et celles destinées à
la consommation. Si l'on s'en tient aux prix pratiqués
dans les marchés à l'intérieur du Cameroun, on peut dire
aisément que ces produits venus de ce pays voisin, sont
très bon marché. Un litre de vin de table à 500 francs
et même moins, des liqueurs dont le prix varie entre
1000 et 2800 francs Cfa, selon la qualité. Cette
situation serait due en partie au fait que la majorité
de ces produits vendus au marché de Kyé-Ossi, sont issus
de la contrebande, et entrent frauduleusement dans ce
marché.
Trafic
Cette contrebande
se déroule sous le regard complice des autorités de la
place, qui d'ailleurs l'encouragent d'une manière ou
d'une autre. Des jeunes gens sont placés juste à la
frontière, côté Cameroun. Pour celui qui a besoin des
produits en provenance de la Guinée Equatoriale, ces
jeunes gens sont les facilitateurs. Ils demandent leur
pourboire et traversent la frontière pour l'acquisition
des produits demandés. Pour celui qui ne veut pas faire
confiance à ces coursiers, il est facile de traverser la
frontière, en se faisant accompagner par un policier
camerounais. Après avoir déposé la carte nationale
d'identité et une somme de 1000 francs Cfa au poste de
police située à la frontière, il vous est autorisé de
faire des achats à Ebebyin, la ville de la Quinée
Equatoriale la plus proche, à 300 francs Cfa de la
frontière, une dizaine de km à parcourir.
Avant que les
relations entre le Cameroun et la Guinée Equatoriale ne
deviennent tendues, l'entrée dans le pays d'Obiang
Nguema se faisait n'importe comment, sans conditions
préalables.
Mais avec la
survenue des tensions, il est demandé à tout candidat de
cette "immigration clandestine" de se débarrasser de
tout objet démontrant de manière ostentatoire qu'il est
Camerounais. Ces objets sont laissés au poste de police
ou à un tiers pour être récupérer au retour. Pour les
hommes en tenue, il leur est demandé de laisser leur
arme et pour les officiers de se débarrasser si possible
de leurs galons. Les achats se faisant en francs Cfa, il
n'y a pas de problèmes de change. Une fois ceux-ci
terminés, vous affrontez maintenant les différents
services intervenants au niveau de la frontière. Côté de
la Guinée Equatoriale, les agents de la douane, logés
dans une baraque en planche d'environ 1m sur 2, fixent
un taux à payer, taux d'ailleurs négociable. Après cette
étape, c'est au tour du policier facilitateur de
récupérer son pourboire. En fonction du volume de
marchandises acquises, les agents de la douane
camerounaise peuvent intervenir ou pas. Toujours est-il
que cette étape terminée, il y a des postes de douane
installés le long du trajet Kyé-Ossi/Ebolowa qu'il
faudrait encore affronter.
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